samedi 27 février 2010

Catch Party (Storyline)

Dans leur cage en verre qui surplombe le stade, Sam et Jim, connectés aux médias universels :

Jim

Elles arrivent une à une : les terribles, les envoûtantes, les catcheuses les plus sexy du monde vont enflammer le stade ce soir !

Sam

Comme à son habitude, première sur le Ring, Black Lolita. Tout droit sortie de sa jungle, elle sent encore la sueur d’éléphant, sa célèbre bouche hypnotique s’agite vers la foule, son regard papillonne sous son filet de chasse, pour elle, le Ring n’est qu’un enchevêtrement de lianes dans lequel elle piège ses adversaires ! Il m’est avis, Jim, que notre adorable Black Lolita nous réserve encore d’exotiques surprises ce soir…

Jim

Espérons-le Sam, car regarde qui voilà ! Sadie Mistress fait son entrée. Elle est méchante. Si méchante, My God ! Rien ne la gêne. Elle a le poignet faucheur d’obstacles. Elle évolue sur des plaines arides.Quelque soit le relief, rien ne l’empêche. Le Ring est un hommage à sa solitude. Au fond, Sam, on peut même dire qu’elle n’a pas d’adversaire car elle est bien trop méchante pour ça !

Sam

Ladies and Gentlemen, Amis Spectateurs, bienvenus! Welcome to the Super Mega Catch Contest Party Tiiiiiime!!!

Jim

Le public ne cesse d’affluer ! Welcome ! Les artistes continuent leur entrée !

Sam

Ha ! Youpi Disco Fever vient de bondir sur le Ring, la chevelure enflammée, les joues scintillantes, le rire rythmé, elle ondule sa combinaison d’artifices. Elle enchante ses adversaires comme le public, nul ne lui résiste, elle a la joie inébranlable, c’est indiscutable. Eblouissante Youpi ! Son seul charme suffit à la catapulter en haut des podiums, ce qui explique cette carrière : la plus ascensionnelle de l’histoire du catch !

Jim

Et enfin ! Du Grand Nord, nous arrive, pour la première fois au Big World Famous Sexiest Catch Party Entertainment : Spino Kantie ! L’adresse et la retenue de son style de combat sont époustouflantes, ses prises tombent juste, ses adversaires sont mis KO proprement, dans les règles, sans aucune bavure, elle fait du catch une véritable œuvre d’art, un délice pour les yeux et l’esprit. Spino Kantie : l’aboutissement d’un catch juste et intelligent !

Sam

Ça y est le combat commence ! Nos déesses s’échauffent, étalent leurs prouesses, valsent sur le Ring, attisent le public, mais rien n’est encore commencé, ce ne sont que des préliminaires saphiques avant … Avant quoi, messieurs dames ???? Pourquoi ne s’affrontent-elles pas ? Qu’attendent-elles ? Que savent-elles que nous ne sachons pas ? Pour qui ou pour quoi préservent-elles leurs prises les plus spectaculaires et pour certaines, les plus mortelles ????

Jim

Mon Dieu ! Mais que vois-je ? Qui vient de faire son entrée dans le stade ? Sam ! Ai-je la berlue ou est-ce bien un Tank qui s’avance dans le public pour se frayer un chemin jusqu’au Ring ???

Sam

Non Jim, tu n’as pas la berlue ! Il s’agit bien d’un Tank qui se dirige tout droit vers l’autel de nos vestales musclées !

Jim

Qui donc a bien pu décider de s’interposer entre les quatres championnes les plus redoutables du monde du catch ?

Sam

Et bien Jim, tu ne vas pas tarder à le savoir, car le Tank est sur le point d’accoster au Ring, l’abordage va nous dévoiler l’identité de ce mystérieux assaut…

Jim

God Damned! Sam! I can’t believe mes yeux!!!!

Sam

JOE LE TANK!!!!!!!

Jim

Oh my… ACCOMPAGNEE DE MEXI-SISSI !!! La Princesse Mexicaine disparue des Rings depuis des années !

Sam

Ils sont ensembles : c’est incroyable !

Jim

On dit que depuis 3 ans, elle suivait un entraînement intensif de butō dans une île japonaise,

Sam

On dit aussi qu’elle avait renoncé au catch et aux gloires pour se consacrer entièrement aux orphelins africains,

Jim

On a même dit qu’elle s’était mariée et qu’elle avait eut des enfants, et qu’elle vivait maintenant une vie de civile sans histoire !

Sam

Et oui, Jim, tout a été dit sur Mexi-Sissi, mais la vérité est qu’on n’a jamais rien su d’elle, c’est sans aucun doute la plus mystérieuse des catcheuses…

Jim

Et la plus surprenante, Sam ! Car aujourd’hui elle réapparaît sur scène accompagnée de Joe Le Tank !

Sam

Dans un Tank !

Jim

Pour nos amis spectateurs qui viendraient d’une autre planète et qui ne connaîtraient pas Joe Le Tank, je rappelle que cet algérien albinos est le plus grand catcheur du monde et de l’histoire : 25 fois champions de la Super Ligue, 17 fois de la Maxi Ligue et, le plus incroyable de tout, il a remporté 7 années de suite le grand Chlem !

Sam

Absolument, Jim, Joe Le Tank est La référence de tous les fans de catch, c’est lui qui a donné ses lettres de noblesse à ce sport et qui en a fait ce qu’il est aujourd’hui : The Biggest World Famous Party !!!!!

Jim

Mais revenons sur le Ring ! Comment vont réagir nos tigresses ? Vont-elles faire front contre l’alliance de la crème du catch qui n’a certainement pas pu venir avec des intentions pacifiques ?

Ça serait une première ! Une alliance entre les 4 plus grandes rivales que le Ring n’ait jamais portées !

Sam

Mais… Que se passe-t-il, Jim ? Ils semblent s’entendre, ils échangent quelques mots, on ne les comprend pas mais ce n’est visiblement pas un flot d’injures… Mais que nous réserve ce match, Jim ?... »

Joe Le Tank s’empare du micro.

Impossible à présent d’entendre Sam et Jim.

Ils ne pourront qu’assister, impuissants, à la suite des évènements, jusqu’à ce que leur cage de verre se soit complètement recouverte de buée.

Joe s’adresse au public :

Joe Le Tank (d’une voix caverneuse et tonitruante)

Ladies and Gentlemen, this is IT! Tiiiiiiiiiiiiiime has come. Let me introduce you the world’s most famous entertainment: theeeeeeeeeeeeeeee Biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiig Caaaaaaaaaaatch Paaaaaaaaaaaaaaaarty ! Ladies and Gentlemen, be ready!

This is not a show!

This is not a game!

This is not a gift!

This is The Party… And you are part of IT!

Tout d’abord : ovation aux déesses, maîtresses des dieux,

Ah ! Les furieuses traîtresses qui ravivent le feu !

Pygmalionnes qui rugissent et qui en ont de bonnes.

Ladies and Gentlemen, entrez, revêtez, vous aussi, vos parures de dieux et déesses, empoignez votre calice, hurlez votre puissance, vautrez vous, asservissez vous, soyez sans dignité comme seuls les dieux peuvent l’être, soyez affreux sales et méchants comme seuls les dieux peuvent l’être, donnez vous en pâture, laissez vous dévorer, riez comme vous vomissez, pas de ce petit toussotement qui fait office de rire chez les vieux hamsters en monocle qui n’ont de la puissance que l’illusion, NON ! Barrissez !

Mes amis, venez. Servez vous. Prenez ce qui vous appartient. Ne demandez plus la permission. Vous trouverez de tout dans mon Tank :

Des velours rouges, des rôtis saignants, des gueules flamboyantes, des langues tentaculaires, des jupons qui s’envolent, des seins qui explosent, des orifices qui s’exposent, et soudain…

Le souffle brûlant d’un rot divin…

Mexi-Sissi (avec un fort accent latino-américain)

Montez sur le Ring ! Les combats sont mixtes. Les règles sont simples. Pas de pitié, pas de violence, mais de la cruauté, et sa propre souffrance en récompense. La peur de faire souffrir vous fera dégringoler au rang de l’humanité.

Laissez donc tout tomber ! Laissez vous avilir, n’ayez pas d’envies, c’est trop petit. Pas de plaisir. Pas de dégoût. Rien. Des chocs, des coups, du touché, du sens et rien que du sens. Jusqu’au bout, sans endurance, laissez-vous partir. Il n’y a pas à oser. Oubliez !

Abandonnez donc cette peur suante et perfide, celle qu’on ravale dans des sourires en plastique… Votre meilleure amie : la Terreur qu’on hurle… Ne plus jamais rien ravaler ! »

Pendant que Mexi-Sissi haranguait la foule, Joe Le Tank, Black Lolita et Sadie Mistress commençaient à s’empoigner avec violence et agilité. Youpi Disco Fever et Spino Kantie s’étalaient dans les gradins, défiaient les spectateurs un par un, agrippaient leur regard et leur cœur. Elles voltigeaient d’un bout à l’autre des rangées. Je pouvais voir de si près l’éclat de leur souplesse, leur corps qui leur répondait au doigt et à l’œil, les muscles vifs libres de courir à leur aise sous leur peau brillante de sueur.

Leurs bras leurs jambes leur torse leur tête tourbillonnaient, le ciel leur appartenait, sur le Ring comme dans tout le stade, tout n’était que corps, coups et chocs. Mon cœur battait à tout rompre. Je n’étais pas la seule. Je n’étais pas le seul corps malade d’être assis. Il n’y avait plus à réfléchir. L’invitation était claire. Après tout, j’étais venue pour m’amuser et passer un bon moment. Je me levais. Je n’étais pas la seule. Je me déshabillais. Je ne gardais que ma culotte. Je voulais être un gladiateur. Je n’étais pas la seule. Moi aussi, je voulais voir mes membres s’envoler. Moi aussi je voulais me cogner sur le crâne de mon voisin pour ne plus me contenter de son seau à pop corn. Nous étions tous des catcheurs. J’ai même réussi à m’agripper à la poitrine de Black Lolita, mais je n’ai pas tenu très longtemps.

Je laissais mon corps aller s’éclater contre les os des autres spectateurs. Des mains m’empoignèrent. Je volais. J’entendis mon dos claquer sur le sol en béton. Les hurlements de la foule explosaient sous la paroi de mon crâne sonné. Je fonçais tête baissée sur un ventre. On dévala les escaliers sans plus trop savoir à qui étaient tous ces membres.

Ce match était décidément excellent. Je passais une soirée inoubliable et je ne regrettais même plus que Carl et Isa m’aient plantée en dernière minute.

Mexi-Sissi (en transe, psalmodiant)

Sentir jusqu’à ne plus rien sentir.

Souffrir jusqu’à ne plus rien souffrir.

S’en foutre plein. S’en foutre, foutre !

Je ne me fis pas priée. J’ai profité tout ce que j’ai pu de cette soirée. Il faut dire qu’au prix du billet, on ne fait pas la fine bouche pour se resservir. Un peu avant le gong final, alors que je tâtonnais autour de mon siège pour retrouver mes fringues car je ne voulais pas rater le dernier bus, on s’accorda avec mon voisin qui reprenait son souffle sur ce point : que le catch sans arbitre amenait une nouvelle dimension au spectacle vivant et qu’il était dorénavant évident que ce sport avait définitivement quelque chose en plus qu’on ne trouvait nulle part ailleurs.

Sam et Jim (essuient la buée de la vitre pour tenter de l’apercevoir, juste avant qu’elle ne disparaisse de la salle surchauffée).

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