samedi 13 décembre 2014

L'amant de Lady Chatterley, DH Lawrence (dit DH)

Pour compenser la belle gueule irlandaise, je vous propose aujourd'hui de parler d'un anglais pédé et mort, ça nous calmera les muqueuses à tous (bon, en vrai, il était pas vraiment ou bien un peu pédé, ou moitié moitié, un genre de bi, un peu comme Virginia Woolf, qui était un peu pédé aussi mais pas que). Je parle ici du sosie de Lambert Wilson, j'ai nommé DH Lawrence.

Nous retrouvons ici cette délicieuse coutume anglaise qui consiste à appeler les gens par la première lettre de leur prénom (oui, et dans Gossip Girl aussi, xoxo). Pour ne pas le contrarier, nous l'appellerons donc DH et il nous appellera AL, on va pas faire de manière et puis c'est l'heure du thé (ah oui, parce que DH, c'est pas un qui carbure à la picole, à peine un petit fond de Sherry Brandy le soir après le dîner). Nous citerons principalement le bouquin sus-dit. On a su lire Fils et Amants mais on n'a pas corné à l'époque, on va pas se le refaire (sa mère risquerait de tirer la gueule).

Alors, DH, ce qui lui plaît most of all, c'est la nature, les myosotis dans les poils de couilles, la rosée du matin, les gros culs et l'explosion spontanée du bourgeon au printemps. Perso, je vais le mettre dans la même case que Tolkien (parce que je refais l'histoire de la littérature anglaise si ça me chante), à cause que pour lui aussi, l'industrie, le monde moderne et tout le pataquès du progrès scientifique, c'est grave Mordor (mais si, le borgne en forme de montagne qui fume tellement qu'il parle comme Amanda Lear). Sinon, aussi, il était pote avec Aldous Huxley (ils s'échangeaient leur marque de brillantine en se promenant dans le parc après le déjeûner), le type du Meilleur des Mondes (mais si, avec les gonzesses qui sont toutes pneumatiques) alors vraiment, l'industrie, le capital et les communistes, ça lui fout la haine. Et moi, dès qu'on casse du chantre de la productivité, je clap clap clap.
DH, il préfère faire l'amour dans les bruyères devant des poussins. Il pense que y'a un moment, faut arrêter de penser car à trop causer, on finit par dire des conneries, alors que se mettre des gens dans le cul, sûr que ça peut pas être une connerie. Y'a pas à avoir mauvaise conscience parce qu'"il savait que la conscience n'est, le plus souvent, que la peur de la société ou la peur de soi-même."

D'ailleurs, et là, moi je le recolle à côté de Tolkien au fond à gauche, il a un peu ce truc de divinité païenne, JRR, il aimait bien les vieilles histoires et les vieux dieux qui se tapaient les vieilles déesses, ou les elfes, c'est pareil franchement, et DH, lui, il est pas loin de se prosterner devant le dieu zizi (qu'il appelle Phallos ou pour les intimes Sir John Thomas)(la chatte, elle, c'est direct Lady Jane, elle a pas droit à un nom de scène en latin). Bon, et comme vous le savez, au blog, les multi déistes, on kiffe.
Quotons : "Non, mon coeur est aussi inerte qu'une pomme de terre, mon pénis pend et ne lève jamais la tête, j'aimerais mieux le couper net que de dire "merde" devant ma mère ou ma tante, qui sont de vraies dames, remarquez le bien; et je ne suis pas réellement intelligent. Je ne suis qu'un adepte de la vie mentale. [...] Le pénis lève la tête et dit bonjour à toute personne vraiment intelligente. Renoir disait qu'il peignait des tableaux avec son pénis; et c'était vrai, et quels tableaux ! Je voudrais bien faire quelque chose avec le mien." (plutôt bidonnant, DH, pour un type qui boit que du thé, non ?)

Et pour ceux qui seraient curieux d'en savoir plus, ça voudrait dire que Renoir, il sait faire ça avec son zguègue :



Alors, les féministes à l'époque ne seront pas d'accord avec nous, mais comme on ne cherche pas à avoir raison au blog, c'est pas grave, toujours est-il qu'on trouve que DH, il sait faire dire des trucs aux gonzesses, je veux dire, pour un type de son époque, c'est tout de même grande classe, on en connaît dans les hémicycles qui sauraient en prendre de la graine, et ils sont pas encore morts, eux. Juste un quote pour illustrer : "Je veux dire que, sauf par vous, je ne suis absolument rien. Je vis pour vous et pour votre avenir. Je ne suis rien par moi-même.' Constance l'écoutait, avec toujours plus de contrariété et de répulsion. Ce qu'il disait était une des abominables demi-vérités qui empoisonnent l'existence humaine. Un homme dans son bon sens pourrait-il dire de telles choses à une femme ? [...] Quel homme doué d'une parcelle d'honneur mettrait sur le dos d'une femme cet abominable fardeau de responsabilité, et la laisserait là, dans le vide ?" (Merci DH)


On l'aime bien aussi quand, dans la préface, il se fout de la gueule de Jonathan Swift (Gulliver et les minipousses, tu sais ?) qui dans un poème désespéré à propos de sa meuf Celia, réalisait dans un spasme d'horreur qu'elle chiait. Alors, ça, DH, ça le fait s'écrouler de rire très fort.

D'ailleurs, là, je vais vous citer son essai Pornographie et Obscénité, parce que ce passage à propos de la censure du cul, il fait du bien comme un bon gros caca, vous allez voir :
"Nous nageons, je le répète, en pleine idiotie. Si le mensonge de la pureté et du ce-que-vous-savez dure encore un peu, la masse de la société deviendra idiote pour de bon : idiote et dangereuse sur ce sujet. Car le public n'est jamais constitué que d'individus. Chaque individu est pourvu d'un sexe, est rivé à son sexe. Si, à force de pureté et de vilains petits secrets, on condamne chaque individu à la masturbation et à l'auto-enfermement, et si on le maintient dans cet état, on produira une société d'idiotie généralisée. Car la masturbation et l'auto-enfermement produisent des idiots. Peut-être quand nous serons tous idiots, ne nous en apercevrons-nous plus."

Et quand il est colère, DH, il sait bien insulter les gens (et ça lui est arrivé pas mal, vu que les censeurs lui ont bien cassé les nouilles). Comme on vous l'a déjà dit, au blog, on trouve que la littérature sert à défoncer la gueule des casse-nouilles aussi, je quote : "Comme pour beaucoup d'insensés, on pouvait mesurer sa démence au nombre de choses dont il n'était pas conscient, aux grands espaces désertiques de sa conscience" (dans ta face, Clifford !). Et puis, il a des éclairs de génie :"La noblesse partait pour des lieux plus plaisants où elle pouvait dépenser son argent sans voir d'où lui venait cet argent." Et aussi, des fois, je sais pas, c'est comme des montées de théine, il s'emballe, à un moment par exemple, il se met à souhaiter que tous les hommes s'habillent en collant rouge avec une veste blanche qui y laisserait voir le cul. Même qu'il pense qu'à partir de là, les femmes pourront bien s'habiller comme elles veulent...

...

Je vous laisse finir la théière, David Herbert ?



mardi 9 décembre 2014

EUREKA STREET, de Robert McLiam Wilson (alias Bob)

Salut. On va faire un tour à Belfast ? Je te préviens, tu y poses un pied et 545 pages plus tard, tu veux plus jamais partir. C'est que ce bon vieux Bob, c'est un sorcier de pub, faut se méfier. Il commence tranquillou en contemplant son chat dans la lumière matinale : "J'ai cligné des yeux devant tous les oiseaux de Belfast dans l'immense ciel de Belfast. De l'autre côté de Lisburn Road, une minuscule femme de ménage a lancé quelques ordures par la porte du restaurant indien huppé. Une bande de chats a jailli de nulle part pour se mettre à table. J'ai reconnu le mien, il se défendait très bien face à ses congénères. C'était le gros sans testicules. J'ai songé à l'appeler pour son petit déjeûner, mais j'ai décidé de ne pas le déranger. Je n'aimais pas particulièrement mon chat. Il jouait un peu trop les putes."

(oh merde, je viens de chercher une photo de lui et au lieu de la salle vieille gueule de poivrot irlandais à laquelle je m'attendais, je tombe sur ça :
C'est quoi ce souk ? Si les bons écrivains au lieu d'être vieux, moches et morts, se mettent à avoir une belle gueule, je fais comment moi ??? Ah non. Mince. Même Levi-Strauss, il l'a dit, faut respecter les tabous ! On rêve pas de se taper un grand écrivain, voyons ! Foutue société de l'image...Y'a pas que du bon dans Intercannette... Je suis déçue, déçue, déçue... Et encore, je vous ai pas mis les plus belles... Enfoiré. Il vieillit même bien.)(bon, reprenons)(je vais ignorer cette information).


Une fois la balade dans Belfast achevée (qu'est ce que vous croyez ?)(que je vais vous refiler ses adresses ?)(c'est pas un blog style life ici), on est allé au pub et il a commencé à me présenter tout un tas de gens et en matière de présentation, Bob, il maîtrise, une vraie machine à faire payer des tournées.
Le père de Chuckie, d'abord (pour Chuckie, faudra lire le livre, c'est un type complexe, il a besoin de volume)(mais quelqu'un d'extrêmement important, attention) : "Pendant deux longues années, il refusa d'épouser la mère de Chuckie, dont il planta alors la graine. Il finit par l'épouser le jour du premier anniversaire de son fils. Ensuite, fatigué de l'opprobre des Lurgan et finalement exaspéré par la collection des portraits de pop stars années soixante de son épouse, il prit la poudre d'escampette, laissant derrière lui l'impression tenace qu'à défaut de se suicider il était parti pour l'Idaho." Voilà pour les absents.
Ensuite, il y a Max, la copine de Chuckie (je vous l'ai dit, c'est quelqu'un d'important) : "Grande mais dotée de tout ce qu'il fallait, elle arborait la saine chevelure des Américaines et ces dents yankees qui scintillent comme des bijoux. En la regardant, on comprenait comment on aurait dû vivre." (si tu comprends pas, c'est que t'as jamais vu d'Américains de la télé ni de publicités. Et c'est pas possible)(ou alors tu es mort depuis longtemps mais alors qu'est ce que tu fous ici ???). Grâce à Max, vous découvrirez la notion de rixe de pub post-moderne (ah oui, faut savoir que boire des bières avec Bob, ça finit en baston, c'est un rituel)(faut partir tant qu'il fait encore mine d'être content de son sort, après c'est foutu).
En parlant de Max, sa mère, elle paye aussi : "Mme Paxmeir était un fac-similé très approximatif de sa fille. Maigre et diaphane comme une feuille de papier à cigarette, elle arborait un sourire crispé par les coups de soleil et ses réticences. Malgré ses airs de dragon, Chuckie se trouva subjugué par son chic de présentatrice télé. On aurait juré que cette femme n'allait jamais aux toilettes." Alors, oui, c'est vrai, Bob, dès qu'il s'agit de l'Amérique et des Américains, il a la verve qui se dresse et qui cingle, pas désagréable. Sa description de New York avec tous ces gens qui singent les personnages des films comme un monde fictif inversé, c'est splendide, de grands enfants à qui on peut alors tout vendre.



Moi, j'veux qu'on m'en raconte encore des comme ça !
C'est un peu le problème de Bob d'ailleurs, comme il dit : "L'aura d'échec et de célibat que je dégageais provoquait ou encourageait peut-être leurs confidences. Mais il y a de quoi s'inquiéter quand trop de gens vous apprécient. L'affection des masses n'est pas toujours bon signe."
Il est pas prêt pour la télé-réalité, Bob, on serait tenter de chercher partout même pourquoi il n'a plus écrit de tel chef d'oeuvre. Mais faut pas se gâcher le plaisir, faut reprendre une pinte de Stout et tendre l'oreille parce que là, on va parler du monde extérieur, et on va pas se faire chier, Bob c'est pas Jean-Pierre Pernaut, attention :
"Faire des achats est la seule activité qui vous permette d'oublier que vous n'êtes pas en mesure de faire des achats." ça, c'est pour la rubrique économie. Passons à la politique.
"Oui, ai-je répondu à voix basse. J'ai un vrai problème avec la politique. J'ai étudié ce truc là. La politique, c'est comme les antibiotiques : un agent susceptible de tuer ou de blesser des organismes vivants. J'ai un gros problème avec ça."Je lui fais un bisou (7 en réalité) et je lui paye la prochaine tournée.



"La semaine précédente, Ronnie avait déclaré à Rajinder que pour lui les Noirs se ressemblaient tous. Le sourire de Rajinder avait été bien pâle. Je crois qu'il avait déjà entendu ce genre de remarque. Ce fut un moment affreux; néanmoins, pour être honnête avec Ronnie, j'ai dû reconnaître qu'à mes yeux aussi les Noirs se ressemblaient tous. Mais à dire vrai, les Blancs aussi se ressemblaient tous pour moi. A mes yeux, nous avions tous l'air plutôt moches." J'ai décidé que je dirai plus rien là-dessus, je laisse ceux qui écrivent des livres en causer, ils savent, ils sont capables, eux. La preuve : "De manière assez intéressante, les durs à cuire protestants / catholiques adoraient flanquer des raclées mémorables et routinières aux catholiques / protestants, même si ces catholiques / protestants ne croyaient pas en Dieu et avaient solennellement renconcé à leur ancienne foi. Il n'était pas sans intérêt de se demander ce qu'un bigot d'une confession donnée pouvait reprocher à un athée né dans une autre confession. Voilà ce qui me plaisait dans la haine version Belfast. Il s'agissait d'une haine pataude, capable de survivre confortablement en se nourrissant de souvenirs de choses qui n'ont jamais existé." Ma main à couper que y'a d'autres endroits où ça ressembleraient aussi à ça.
Mais, attention, il s'agit de Bob, et on va pas passer à côté des chaumières sans s'arrêter :
"La somptueuse et paresseuse majorité du monde ne se fera jamais couillonner à écrire quoi que ce soit nulle part et, de toute façon, elle ne saurait pas quoi écrire. Son esprit permissif, clément, hétérogène, changerait d'avis à mi-chemin." (on dirait moi...)
Et ensuite, Bob, il vous assène son coup de grâce, mais vous savez, LA grâce, il se dévoile en grand shaman de la pinte, beau, si beau :
"En effet, alors que vous regardez à la lisière de votre champ visuel éclairé, vous apercevez les immeubles et les rues où cent mille, un million, dix millions d'histoires sombres, aussi vivaces et complexes que la vôtre, résident. Le divin ne va jamais plus loin que ça."

Après ça, il faut régler la note et partir. Il va pas tarder à cogner.